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Décarbonation : une chance unique pour réinventer l’économie française et la rendre durable
Avec une baisse significative des émissions de gaz à effet de serre en France depuis 2023, la dynamique de décarbonation prend une nouvelle ampleur. Sylvain Waserman, président de l’Agence de la Transition Écologique (Ademe), revient sur les raisons de cette tendance, les obstacles rencontrés et l’accompagnement proposé par l’agence pour soutenir la transformation économique.

Un nouveau tournant vers la planification écologique
La diminution des émissions de gaz à effet de serre en 2023 marque, selon Sylvain Waserman, le début d’une nouvelle ère dans la transition écologique française. La planification écologique s’appuie désormais sur des objectifs chiffrés, des indicateurs précis et des évaluations rigoureuses de résultats. L’accent est mis sur l’efficacité carbone des investissements, maximisant chaque euro public investi pour obtenir un retour quantifiable en CO2 évité.
L’approche adoptée par la France montre des résultats tangibles. En 2023, la réduction des émissions a atteint 5,8%, une performance que Waserman attribue à une action collective. Cela reflète la montée en puissance des moyens déployés : le budget de l’Ademe a été multiplié par quatre entre 2020 et 2024, atteignant 4 milliards d’euros, même si une réduction de 30% est prévue à l’avenir.
Les défis du secteur des transports
Le secteur des transports reste un point faible de la transition. Malgré les progrès accomplis, les émissions de ce secteur n’ont toujours pas significativement diminué. Waserman pointe plusieurs leviers potentiels : augmenter le taux d’occupation des véhicules, qui stagne à 1,2 personne par voiture, et mieux adapter l’offre de transport aux nouveaux besoins des usagers, surtout après la pandémie qui a redéfini les dynamiques de mobilité.
Des solutions innovantes émergent, notamment par le biais du programme « eXtrême Défi », qui vise à développer des véhicules légers, éco-conçus et durables. Par ailleurs, les véhicules électriques, même s’ils ne représentent pas une solution parfaite, voient leur coût d’entretien diminuer et leur adoption croître, en particulier dans les flottes d’entreprise et les transports publics (22% des bus sont désormais électriques).
Une transition source d’avantages compétitifs pour les entreprises
La décarbonation est en passe de devenir un critère essentiel de compétitivité pour les entreprises. Waserman souligne que dès 2026, toutes les offres publiques devront intégrer des clauses environnementales, renforçant ainsi la pression sur les acteurs économiques. Les entreprises qui ne s’adaptent pas risquent d’être exclues des chaînes de valeur. Pour certaines industries, comme la verrerie, dont les clients du secteur du luxe s’engagent à être 100% décarbonés d’ici 2030, cette transition est une question de survie économique.
En réponse à ces enjeux, l’Ademe a déjà soutenu de grands groupes industriels dans leurs projets de décarbonation, leur apportant à la fois des financements et une expertise unique. L’agence se présente ainsi comme un observatoire transversal, capable de mettre en lien des innovations et des bonnes pratiques issues de secteurs variés.
Nouveaux modèles économiques et opportunités d’innovation
Pour Waserman, la décarbonation est également une formidable opportunité pour inventer de nouveaux modèles économiques. L’Ademe a accompagné pendant 18 mois huit entreprises dans ce sens. Inspiré par l’exemple de Michelin, qui vend désormais des kilomètres plutôt que des pneus, ou d’Elis, qui a instauré un modèle de location de textiles, l’objectif est de repenser la conception des produits pour les rendre plus durables. L’agence met également en lumière une entreprise du secteur agricole qui, au lieu de vendre des pesticides, commercialise maintenant des hectares de cultures saines grâce à des outils de précision, réduisant ainsi l’usage de produits chimiques tout en augmentant sa marge.
L’importance de la transparence et de la crédibilité des trajectoires de décarbonation
Pour garantir la crédibilité des engagements de décarbonation des entreprises, l’Ademe a développé la méthode ACT (Accelerate Climate Transition). Cette méthodologie évalue objectivement les efforts des entreprises, offrant une arme efficace contre le « greenwashing ». ACT est déjà utilisée par des grands groupes comme Carrefour, qui a impliqué ses principaux fournisseurs pour adopter des pratiques durables.
Le partenariat récent avec la Banque de France va encore renforcer l’utilisation de cette méthodologie, contribuant à orienter les financements vers la finance verte. Ce partenariat se veut une réponse à la directive européenne CSRD, qui contraindra bientôt les grandes entreprises à publier leurs plans de transition dès 2025.
Vers une économie décarbonée et résiliente
La transition écologique, loin d’être une contrainte, apparaît pour de nombreux acteurs économiques comme une occasion de réinventer leurs activités et d’acquérir des avantages compétitifs. Le soutien de l’Ademe, tant financier qu’en matière d’expertise, semble crucial pour accompagner les entreprises dans cette transformation inédite. La décarbonation devient ainsi une opportunité pour l’innovation, permettant non seulement de préserver l’environnement mais aussi de bâtir une économie plus résiliente et pérenne.
Avec une planification rigoureuse, des moyens conséquents et des objectifs ambitieux, la France s’engage dans un virage décisif de sa transition énergétique. La réussite de cette entreprise collective dépendra de la capacité de chacun — citoyens, entreprises, institutions — à jouer pleinement son rôle dans cette transformation.
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