Photovoltaïque et biodiversité : le conseil national de protection de la nature alerte sur une menace croissante pour les écosystèmes naturels

Dans un contexte où la transition énergétique est une priorité, le développement rapide des installations photovoltaïques suscite des préoccupations majeures pour la biodiversité. Le Conseil national de protection de la nature (CNPN) vient de publier un avis inquiétant, soulignant les dangers d’un déploiement désordonné des panneaux solaires, en particulier dans les zones naturelles sensibles.

Une alerte sur un développement déséquilibré

Dans un avis adopté le 19 juin 2024 et rendu public en juillet, le CNPN exprime son inquiétude face à la prolifération des installations photovoltaïques sur des espaces naturels et semi-naturels. Alors que l’objectif de la France est d’atteindre 100 gigawatts (GW) d’énergie photovoltaïque d’ici 2050, les membres de cette instance consultative estiment que la méthode actuelle de déploiement risque de nuire profondément à la biodiversité. En effet, les grandes installations au sol consomment d’importantes superficies, souvent au détriment des écosystèmes.

Bien que le cadre législatif, notamment la loi de mars 2023 sur l’accélération de la production des énergies renouvelables, ait fixé des garde-fous – par exemple, en limitant la taille des centrales en milieu forestier – le CNPN déplore que certaines zones protégées ou sensibles ne soient pas exclues de ce développement, malgré la menace qu’elles subissent.

Un développement au détriment des écosystèmes naturels

Le CNPN pointe du doigt une contradiction majeure : malgré la volonté d’utiliser en priorité des zones déjà artificialisées (toitures, parkings, etc.), de plus en plus de projets voient le jour sur des espaces naturels, menaçant des puits de carbone vitaux comme les forêts ou les zones humides. Parmi les exemples les plus frappants, le projet Horizeo en Gironde, qui couvre 680 hectares, ou les installations prévues sur des écosystèmes fragiles comme la Montagne de Lure et la forêt jurassienne.

Les scientifiques et défenseurs de l’environnement sont de plus en plus nombreux à dénoncer ces projets, arguant que leur mise en place dans des zones naturelles pourrait détruire des habitats essentiels pour de nombreuses espèces. En outre, le CNPN critique une évaluation environnementale souvent insuffisante et une instruction des projets bâclée, aggravée par le manque de moyens humains dans les services de l’État.

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Des garde-fous ignorés et des compensations insuffisantes

L’une des critiques majeures formulées par le CNPN porte sur le contournement des dispositifs légaux censés protéger la biodiversité. Les études d’impact, lorsqu’elles existent, sont jugées inégales, et les mesures compensatoires proposées par les porteurs de projets sont jugées trop faibles et sous-dimensionnées. En 2022 et 2023, seulement 11 % des projets de centrales au sol soumis à une évaluation environnementale ont fait l’objet de dérogations pour les espèces protégées, une preuve, selon le CNPN, de la légèreté des évaluations réalisées.

L’instance pointe également la faible ambition des mesures de compensation, notamment en matière de prévention des risques incendies. Ces obligations de débroussaillement, sur de vastes zones autour des installations, entraînent une dégradation supplémentaire des écosystèmes, souvent sous-estimée.

Recommandations pour un déploiement responsable

Face à ces constats alarmants, le CNPN propose plusieurs recommandations pour concilier développement des énergies renouvelables et protection de la biodiversité. La principale préconisation est de réserver les installations photovoltaïques aux zones déjà artificialisées, telles que les parkings et les toitures. Bien que cette solution soit plus coûteuse et complexe à mettre en œuvre, elle est, selon le CNPN, la seule voie respectueuse des écosystèmes.

Par ailleurs, l’instance demande l’interdiction stricte des centrales solaires dans les zones à haute valeur écologique, notamment les aires protégées, les zones humides, et les forêts. Le CNPN insiste également sur la nécessité de mieux encadrer les appels d’offres pour ces projets, afin d’éviter que des écosystèmes fragiles ne soient sacrifiés sur l’autel de la transition énergétique.

Le CNPN recommande enfin de soumettre les centrales photovoltaïques de plus de 1 MW à la réglementation des installations classées pour la protection de l’environnement (ICPE). Cette mesure permettrait d’exercer un contrôle plus strict sur les impacts environnementaux de ces projets.

Un défi à relever : concilier transition énergétique et préservation de la biodiversité

La question du développement des énergies renouvelables pose un véritable dilemme : comment répondre aux impératifs de la transition énergétique sans compromettre la biodiversité ? Le CNPN appelle à une action concertée et cohérente, qui prenne en compte non seulement les enjeux climatiques, mais aussi ceux liés à la protection des écosystèmes.

Alors que la pression pour développer rapidement les énergies vertes ne cesse de croître, il est crucial que les décisions soient prises avec précaution, en privilégiant des solutions qui limitent l’impact sur la nature. Une approche précipitée pourrait entraîner des dommages irréversibles pour la biodiversité, fragilisant davantage notre environnement, déjà mis à mal par le changement climatique.

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